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“La truffe nous manipule dès que nous la manipulons”

Colloque de la 2e fête internationale de la truffe

Le colloque proposé hier après-midi à l’occasion de la 2e fête internationale de la truffe au théâtre de Brive a tenu ses promesses.

Marc-André Sélosse

Plus de deux cents personnes pour écouter d’éminents spécialistes de la truffe à l’occasion d’un colloque, c’est déjà un succès. Mais ce moment fort de la 2e fête internationale de la truffe fut surtout remarquable par la qualité des interventions qui ont suivi les recommandations fournies en introduction par Patricia Bordas, présidente du Syndicat du Causse Corrézien: “Les intervenants évoqueront le lien entre la truffe, le territoire et les habitants pour poser les fondations d’un développement harmonieux dans un milieu respectueux de sa biodiversité”. Ambitieux programme, mais qui a suscité des interventions à la hauteur, dont on devrait bientôt pouvoir lire le compte-rendu dans une publication dédiée aux travaux de ce colloque.

Parmi les intervenants, se trouvait Marc-André Sélosse, directeur de recherche au CNRS, professeur à l’université de Montpellier II. Il a apporté une contribution directe à l’organisation du colloque d’hier en fournissant aux organisateurs une liste de noms de personnes dont il apprécie les travaux.

Le scientifique a ouvert le colloque en détaillant des images de truffes au tout début de leur vie. Ces champignons, qui ont père et mère, ne peuvent voir le jour que grâce à des échanges très nombreux avec leur environnement, végétal certes, mais aussi animal.

La truffe, un réseau d'interactionL’importance du végétal pour voir naître des truffes est connue. Néanmoins, les travaux des scientifique se poursuivent pour arriver à en savoir encore plus sur le lien entre le chêne et le champignon. Dans le cadre du programme “Systruf – bases d’une gestion écologique durable des écosystèmes truffiers (producteurs de tuber melanosporum)” qu’il dirige, Marc-André Sélosse est notamment arrivé à prouver scientifiquement qu’il y avait un lien nourricier direct entre l’arbre et la truffe. Comment? En isolant l’arbre et ses racines de toute influence extérieure, et en introduisant du carbone 13 dans le végétal. Au fil du temps, ce carbone s’est retrouvé dans les racines, puis dans les truffes. Actuellement, une expérience similaire est menée pour analyser le lien entre la truffe et le sol. Au final, les scientifiques devraient pouvoir comparer l’influence de l’arbre et celle du sol sur la truffe.

“Pas de truffe sans animaux”, a lancé l’intervenant. “Elle est repérable facilement par les animaux, et identifiée comme agréable”. Mets de choix pour, par exemple, les sangliers, la truffe possède une capacité étonnante: une partie de ce qui est ingurgité résiste à tous les sucs gastriques. Conséquence: les animaux contribuent à disperser les spores sur le territoire, un peu comme les abeilles dispersent les pollens, mais avec un moyen différent que nous qualifierons de “naturel”…

“Nous aussi, humains, nous contribuons à cette dispersion”, a expliqué le scientifique, “à la façon des animaux mais aussi en organisant des marchés aux truffes par exemple”. Constatant que la truffe sait se rendre “attrayante” pour les végétaux et les animaux, provoquant ainsi des interactions indispensables à son développement, le scientifique conclura ainsi: “Finalement, la truffe nous manipule dès que nous la manipulons”.

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Olivier SOULIÉ

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