Beaucoup d’émotion hier soir lors de la soirée spéciale Au bord du monde, en présence du réalisateur Claus Drexel et du producteur Florent Lacaze. Un film atypique, de toute splendeur, qui donne la parole aux sans-abri. Sans misérabilisme, mais avec beaucoup d’humanité. A voir, absolument. Le film, encensé par la critique, est programmé au Rex jusqu’au 9 février.
La séance était prévue en salle 2, mais les 140 places ne pouvaient suffire à absorber la queue qui patientait encore à la caisse. Alors le public déjà bien installé a dû se lever pour gagner promptement la grande salle. Déjà un signe. Loin des sujets porteurs, le film de Claus Drexel bouleverse et trace son chemin. “C’est un film qui touche les gens“, tente le réalisateur pour expliquer le succès rencontré tant auprès des médias que du public. “C’est un film formidable, fait de très belles rencontres”, surenchérit Florent Lacaze, le producteur Brivo-Beynatois.
Dans la salle, un public très éclectique, des jeunes comme des aînés, des sensibilisés au sujet comme de simples curieux, des SDF aussi. Un public qui aura du mal, une fois la projection achevée, à pouvoir émerger. Car le film n’est pas un documentaire de plus, mais bien une plongée au cœur de l’humain. Sans parti pris. Sans discours moralisateur. Mais avec un esthétique soigné. “Je voulais que chaque plan ressemble à un tableau”, livre le réalisateur. Plans fixes, de face, très larges, en CinémaScope… La salle est tiraillée entre beauté et dureté des images. Surprise aussi par “la richesse des réflexions”.
“Il faut oser faire ce que vous avez fait”, reconnait enfin un intervenant déclenchant une nouvelle salve d’applaudissements. “Vous avez fait de ces sans-nom, de ces sans-titre, des êtres humains à part entière, ce que la plupart d’entre nous oublions de faire lorsque nous les croisons. Vous leur avez permis d’être”, résume une dame bien mise. De fait, pour tous les spectateurs, ces anonymes ont désormais retrouvé leur prénom.
“Ces gens qu’on croise dans la rue sans s’arrêter, on a vraiment envie de les connaître”, ose une plus jeune. Car le film fait passer de l’autre côté du miroir. Derrière la misère, se cachent des hommes et des femmes condamnés à une survie où le borderline a été franchi depuis belle lurette, où les préoccupations s’avèrent très éloignées du quotidien des passants que l’on ne croise jamais dans le film. Un autre monde fait pourtant d’une même humanité.
“Par delà l’émotion, la beauté, la compassion”, lâche finalement un monsieur, “je me vois mal dire à un gars sur le trottoir de venir chez moi. Alors que peut-on faire, nous?” “On peut leur sourire, leur dire bonjour, les considérer comme nos égaux”, témoigne par expérience Claus Drexel. “C’est de ce manque de lien dont ils souffrent le plus, dans notre société où l’homme n’est plus dès qu’il ne sert plus à rien.”
Au bout du monde au Rex du jusqu’au 9 février (1h38)
Sur ce sujet vous pouvez lire notre entretien avec le réalisateur Claus Drexel.