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Pourquoi faut-il assister à la conférence d’Aline Mura-Brunel sur Balzac et Modiano ?

Trois questions posées à Aline Mura-Brunel, qui enseigne la littérature française des XIXe, XXe et XXIe siècles à l’université de Tours, donnent trois bonnes raisons d’assister à sa conférence samedi 23 mars à 15h à la médiathèque. On y va parce que d’abord c’est rare que ces sujets sortent des colloques et des universités. Parce que l’enseignante à la verve passionnée ne fait ni dans le jargon ni dans le bien-pensant. Parce que Balzac, parce que Modiano, et parce qu’elle en parle avec esprit et cœur. Il serait faux de croire que cette conférence n’est pas grand public, de même qu’il serait faux de croire qu’en nous parlant des personnages et des romans, Aline Mura-Brunel nous parle d’autre chose que de nous-mêmes, de nos vies, de notre monde.

Brive Mag’: Comment parle-t-on au tout public de critique littéraire, de recherche universitaire et de théorie de la littérature ?

Aline Mura-Brunel: Il faut d’abord très bien maîtrisé son sujet, l’avoir digéré en ayant pris de la distance avec la théorie et la critique. Il est aussi important de ne pas employer de vocabulaire trop technique, s’affranchir du jargon, transmettre ce qui peut être compliqué dans des termes simples. Il faut aussi vraiment s’adresser au tout public, le regarder, ne pas parler pour soi mais tenir un discours adressé, observer les réactions, si besoin répéter, reformuler. Il faut aussi donner des exemples, ne pas rester dans les théories sèches qui sont indigestes, ménager des pauses grâce à des anecdotes mais aussi des traits d’humour.

Brive Mag’: De quoi va-t-il être question ?

Aline Mura-Brunel: Je vais faire en introduction une présentation générale de l’évolution du roman du XIXe au XXIe siècle. Pour que cela soit plus accessible, elle va cristalliser autour du personnage. J’ai choisi des textes peu connus de Balzac: Pierre Grassou, une nouvelle de 40 pages, magistrale de concision, extrêmement drôle qui pose la question de la compatibilité de la valeur et du succès des œuvres. Je n’ai aucun mépris pour les romans grand public comme certains puristes. J’ai d’ailleurs élaboré différents critères pour mieux cerner la notion de chef d’œuvre. Le succès ne suffit pas, il y a aussi bien sûr le style, la langue, la musique singulière mais il faut le prendre en compte aussi. Et parce que les romans de Balzac sont théâtraux et ses pièces narratives, j’ai également choisi Le Faiseur, pour réhabiliter le Balzac dramaturge. Dans cette pièce, l’écrivain se fait visionnaire. C’est la vie de Madoff avant l’heure. La spéculation, la bourse, tout y est.  Pour Modiano, j’ai choisi La Petite Bijou et Un pedigree où l’on entend si bien la voix poétique, singulière, où on retrouve des personnages troubles, évanescents sans noms fixes ni psychologie déterminée. C’est difficile de choisir avec Modiano. Tout fait œuvre, il crée une musique lancinante, une atmosphère qui s’imprègne en vous… Le choix des exemples compte vraiment quand on s’adresse à un large public.

Brive Mag’: Pourquoi c’est important de sortir ces connaissances des universités et des colloques et de les porter à la connaissance du grand public ?

Aline Mura-Brunel: L’enseignement, la transmission, c’est une passion. Puis c’est gratifiant. Un jour, je me suis retrouvée à un colloque à Toronto. J’écoutais un de mes maîtres. J’en avais la chair de poule tellement c’était intelligent. Nous étions 5 dans une salle immense. Je me suis alors demandé ce que tout cela voulait dire ? Cela m’a alors paru évident. A trop rester entre soi, on risque d’étouffer, de tuer la critique. On est fier de nous, mais on est fier tout seul. Puis j’étouffais avec Balzac, enfin non, avec les balzaciens! On était dans l’érudition. Je voulais être aussi dans l’humilité. Voir l’éclair s’allumer dans les yeux des jeunes et des plus âgés. Puis, la littérature, c’est une leçon de vie. Personnellement, c’est Balzac qui m’a appris à penser. Avec la littérature, c’est tout un monde qui s’ouvre. La littérature offre de vivre doublement, triplement, presque infiniment.

Deux rendez-vous sont programmés:

  • vendredi 22 mars à 20h30, au Théâtre de la grange. Auteure, entre autre, de Des voix dans la nuit : Dans la solitude des champs de coton : Bernard-Marie Koltès (éditions Le lavoir Saint Martin, 2015),  Aline Mura-Brunel interviendra après la séance de lectures de larges extraits de la pièce Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès par le théâtre du cri.
  • samedi 23 mars à 15h à la médiathèque. Conférence ponctuée de lectures du Théâtre du Cri. Suivie d’une séance de dédicaces. Durée: 1h. Entrée libre. 05.55.18.17.50

 

Jennifer BRESSAN

Jennifer BRESSAN

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