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Paniers vides et ventres creux

Des jours sans. Pendant 4 ans. C’est ce à quoi ont été confronté les Français, et parmi eux les Brivistes, lors de la Seconde guerre mondiale. Ils ont dû faire avec le manque de tout: de lait, de beurre, d’œufs, de viande mais aussi de vêtements, chaussures… C’est ce quotidien que retrace en affiches et objets l’exposition au centre Edmond Michelet. À découvrir à l’étage jusqu’au  30 novembre 2019.

“Paniers vides et ventres creux, tel est le sort que la dureté des temps assigne aux Français condamnés à vivre, quatre années durant, au ras des rutabagas.” C’est avec cette phrase que les historiens, Jean-Pierre Azéma et Olivier Wieviorka, débutent leur chapitre “Subir: le rationnement” dans leur livre consacré à Vichy 1940-1944 (chez Perrin). Une allégorie dont s’est inspiré le centre-musée pour le titre de son exposition.

L’exposition a été conçue à partir des affiches issues des riches collections du musée. Y sont assortis divers objets du quotidien qui témoignent des privations de toutes sortes. Un vieux poste TSF vous met dans l’ambiance en distillant des airs d’époque. En cherchant bien, vous trouverez une recette de “gâteau de nouilles” car avec l’absence chronique de beurre, de sucre, d’œufs, de chocolat, confectionner un dessert tenait de la gageure. Journaux et emballages alimentaires y allaient de leurs suggestions mais les menus restaient peu diversifiés. Les générations qui ont connu la guerre ont d’ailleurs rayé ensuite les rutabagas de leur assiette.

Trouver de quoi manger était tout une organisation comme en témoignent aussi les tickets de rationnement. Mais pas seulement. S’habiller est tout aussi difficile. “Le vieux vaut le neuf”, clame une affiche à l’effigie de Mam’zelle Chiffon pour favoriser la récupération de vieux textiles pour être ensuite transformés. C’est le système D qui prime comme le montrent sous vitrine chaussures avec semelles de bois, sandales tressées ou ceinture en carton… On taille même des chaussures dans les pneus de voiture.

Le mérite de cette exposition est aussi de resituer Brive dans ce conflit mondial. La guerre déclarée le 3 septembre 1939, Brive devenue terre d’accueil pour de nombreux réfugiés, va devoir nourrir une population démultipliée. Ainsi dès octobre 1939, plus de 1 500 personnes, provenant principalement du territoire de Belfort évacué, sont accueillis dans la cité gaillarde. D’une population de 29 074 habitants au recensement de 1936, la ville passe à 32 000 personnes en mars 1940. La municipalité doit faire face aux premières difficultés pour héberger et nourrir tous ces réfugiés. La générosité publique mais aussi des réquisitions permettent néanmoins de faire face. Au printemps 1940, l’exode s’amplifie : plusieurs millions de Français et de Belges fuient l’invasion des troupes allemandes. Située sur l’axe Paris-Toulouse, Brive voit arriver plusieurs dizaines de milliers de réfugiés supplémentaires, venus principalement du Nord et de l’Est du pays. Les écoles vont servir de lieux provisoires d’hébergement. Si la plupart rentrent dans leurs foyers après la signature de l’armistice, environ 5 000 réfugiés restent à Brive. Parmi eux, une importante communauté juive, interdite de retour en zone occupée.

Après la défaite face à l’Allemagne et l’armistice du 22 juin 1940 qui dépèce la France, Brive, sous-préfecture et ville la plus peuplée de Corrèze, se retrouve alors en zone dite « libre », sous l’administration directe du nouveau régime installé à Vichy. Les préoccupations matérielles prennent vite le pas sur le contexte de la guerre : l’absence de nombreux prisonniers, les privations et restrictions liées à l’occupation du territoire pèsent sur le quotidien des Brivistes. La ville est alors sous l’administration directe du nouveau régime installé à Vichy. Une réglementation très restrictive se met en place au point d’interdire aux non Brivistes de se ravitailler dans les marchés de la ville. Relativement épargnées par l’Occupation jusqu’ici, Brive et la Corrèze voient en novembre 1942 leur situation changer avec l’invasion de la zone sud par les troupes allemandes. Désormais, des militaires et des forces de police allemandes sont présents à Brive, et exercent des mesures de répression et de réquisition de tous ordres durcissant toujours plus les conditions de vie.

L’affiche a évidemment toute sa place dans la propagande de l’époque. Elle dénonce le marché noir ou les incendies de récoltes par certains maquis, incite à donner des bras à l’effort de guerre: “Finis les mauvais jours, Papa gagne de l’argent en Allemagne”… Des affiches mieux que de longs discours.

 

Paniers vides et ventres creux jusqu’au 30 novembre 2019 au centre Edmond Michelet, 4 rue Champanatier à Brive. Entrée libre et gratuite. Horaires d’ouverture: du lundi au vendredi de 11h à 18h et le samedi de 13h à 18h. Infos au 05.55.74.06.08 et sur museemichelet.brive.fr.

Marie Christine MALSOUTE, Photos : Sylvain MARCHOU

Marie Christine MALSOUTE, Photos : Sylvain MARCHOU

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