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Ma vie au temps du confinement : Said Kartache, chauffeur routier (14)

Leurs missions suscitent depuis le début de la crise un intérêt plus grand qu’à l’ordinaire. Et pour cause, grâce aux chauffeurs routiers, les magasins continuent d’être ravitaillés. Pourtant, entre difficultés d’accès aux sanitaires et nouveaux protocoles à respecter, ils exercent leur métier dans des conditions compliquées. Said Kartache raconte.

Ce jour-là, il revient de la région lyonnaise et rentre au dépôt. Said Kartache est chauffeur routier depuis 26 ans, dont 21 au sein des Transports Madrias. « Pendant le confinement, notre métier n’est pas très différent, mais son exercice est un peu plus difficile », commence-t-il. « On gagne du temps sur les routes car il y a moins de circulation. Il y a bien quelques véhicules et des taxis mais pas énormément. A 90%, ce sont des routiers sur l’autoroute et on croise des contrôles de la gendarmerie à quasiment chaque péage. Ils ne nous arrêtent pas bien sûr. »

Le quotidien n’est pas tout rose pour autant. « Nous passons plus de temps chez nos clients pour les visiter et les livrer du fait du protocole sanitaire à respecter. » Mais le gros point noir reste encore l’accès aux toilettes et aux douches. « Les quinze premiers jours ont été très compliqués. » Et il pèse ses mots. « On n’avait pas du tout accès aux sanitaires. Heureusement que nos clients étaient compréhensifs. » Les choses s’arrangent à présent mais en moyenne « ce ne sont que 4 sanitaires sur 10 qui ont été rouverts. C’est dommage que les sociétés d’autoroute ne jouent pas le jeu », déplore-t-il. Même difficulté pour se nourrir. Bien qu’entre collègues, et grâce à leur informatique embarquée, ils échangent les points de restauration ouverts, les adresses se font rares. « On mange plus souvent froid que chaud. » A cela, il faudrait encore ajouter sa sciatique et l’impossibilité de consulter un ostéopathe…

Malgré toutes ces contraintes, Said Kartache explique plutôt bien vivre son quotidien de routier. « On s’adapte et nos dirigeants ont anticipé les choses en nous fournissant masques, gants à usage unique et gel hydroalcoolique. Globalement, on travaille dans de bonnes conditions. »

Pour autant, du camion à son domicile, ce père de famille prend le maximum de précautions. « Nous disposons d’un jardin avec un accès par l’arrière. Je m’y change, je mets toutes mes affaires dans la machine et je me lave avant d’aller retrouver mes enfants et ma femme. » Elle aussi continue de travailler, elle est dans le milieu médico-social alors pour garder les enfants, il faut un peu jongler. Là encore, ils se débrouillent, d’autant plus que « le confinement avec mes enfants n’est pas un problème ! », sourit-il.

Mais il lui tarde de pouvoir revoir sa mère. « Je l’appelle tous les jours, elle est diabétique et ne sort pas du tout » ; mais aussi sa deuxième famille, le groupe de parents des amis de son fils qui fait du foot à Saint-Pantaléon où une grande fête devrait, le moment venu, sceller les retrouvailles.

« D’ici là, il continue le travail avec la volonté de se rendre plus que jamais utile. « Quand on voit arriver le livreur, par ces temps, on est vraiment content », sourit-il. « Nous ravitaillons la plupart des magasins tous les deux ou trois jours. Il n’y aura pas de problème d’approvisionnement, de pénurie», assure-t-il et explique que même le regard des automobilistes a changé ! « D’ordinaire, on nous montre du doigt car on gêne, on est lent. Mais là, on sert à quelque chose, on remplit les magasins, c’est d’ailleurs ce que nous faisons tout au long de l’année ! Mais, quand on traverse des villages ou des villes moyennes et que les gens nous saluent, nous remercient, nous disent bravo, cela fait chaud au cœur ! »

 

Jennifer BRESSAN

Jennifer BRESSAN

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