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Emploi des handicapés : "Au moins laisser sa chance"

Lucille 1pano

“Un jour, un métier en action” permet à une personne handicapée de passer une journée de travail en doublon avec un salarié. A l’occasion de cette Semaine pour l’emploi des personnes handicapées, la Ville de Brive s’associe pour la première fois à l’opération en accueillant 7 personnes dans différents services. Rencontre avec Lucille Arnold, 22 ans, immergée au sein de l’équipe Brive mag le temps d’une action certes courte mais qui vise à changer le regard sur le handicap au travail… En tout cas pour Lucille à faire passer aussi quelques messages bien sentis.

Elle se serait bien vue en architecture. Ou peut-être en Haute école de commerce de Paris… Sauf que la vie de Lucille a brusquement basculé lorsqu’elle était en seconde. “J’allais avoir 16 ans, dans un mois et 3 jours exactement, lorsque j’ai eu un AVC.” Hémiplégie massive du côté gauche, diagnostiquent les médecins en lui prédisant qu’elle ne récupérerait pas sa jambe. Pour Lucille, pas question d’accepter. “J’avais deux choix de vie, soit je me battais, soit je continuais comme ça…”

Lucille2S’en suivent deux mois et demi d’hospitalisation, puis un an à domicile axée sur une rééducation incompatible avec un emploi du temps scolaire. Lucille retrouve l’usage de sa jambe, pas de son bras, tente une formation par correspondance en décoration d’intérieur et reprend l’équitation, ce qui en dit long sur sa force de caractère. Et c’est la chute de cheval : fracture du bassin. La voila à nouveau stoppé dans son élan. “J’ai mis le cheval un peu en sourdine, le temps de trouver un emploi et d’avoir mon permis.” Lucille a déjà choisi sa voiture, attend de décrocher le précieux sésame et travaille aujourd’hui à l’EPDA (Etablissement public départemental autonome) du Glandier vers Pompadour où elle bénéficie d’un contrat d’avenir. “Je travaille comme secrétaire. J’ai appris sur le tas. Ça permet de vivre, c’est aussi une première expérience professionnelle, mais ce contrat ne dure que 3 ans. Ce que je cherche, c’est un métier pour lequel je serais vraiment formée.” Mais quoi ?… Elle ne sait plus trop.

Lorsque sa conseillère emploi lui parle de l’opération “Un jour, un métier en action” organise par l’Agefiph, elle cible ses préférences “autour de l’ordinateur et du commercial”. Aujourd’hui, elle découvre le métier de maquettiste au sein de Brive mag, demain elle vivra une expérience similaire dans une banque. “Une journée, c’est un peu court, mais c’est mieux que rien. Ça permet d’avoir une idée, quitte à demander ensuite un stage“, conjoncture-t-elle.

Comme elles, ils s(e)ront 7 immergés dans une journée d’un agent, de la cuisine centrale à la comptabilité en passant par la médiathèque ou la propreté. L’action fait l’objet d’une certaine médiatisation lors de cette semaine nationale, mais elle est possible également tout le reste de l’année. “C’est sur, ça fait un peu marketing, mais ça permet de parler du problème.” Et dans ce domaine, Lucille aurait beaucoup de choses à dire. “C’est quand même aberrant qu’en 2014 des entreprises préfèrent payer des amendes plutôt que d’embaucher des handicapés, sachant en plus qu’il y a des aides de l’Etat pour aménager les postes“, dénonce-t-elle, révoltée.

Malgré son jeune âge, elle s’est aussi déjà heurtée à son lot d’incohérences dans les démarches administratives, les formations proposées, l’accès à l’emploi comme à l’accessibilité tout court, notamment de la voie publique. “Lorsque j’étais en fauteuil roulant, j’ai même tenté de postuler au Conseil général pour changer les choses de l’intérieur.” Quand elle entend qualifier l’handicap de minorité, ça la fait hurler : “On est quand même 12 millions !!” “Discrimination”, le mot est répété. “Cette discrimination ne changera pas tant qu’on ne changera pas le regard. Le handicap, rien que le mot fait peur… mais c’est pas contagieux. Certains préfèrent ne plus le mentionner sur leur CV. Moi, je l’ai laissé. Mais au moins qu’on reçoive la personne, qu’on lui laisse sa chance. Juste ça.”

 

Marie Christine MALSOUTE

Marie Christine MALSOUTE

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