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Au tribunal, des “Clichés de femmes” pas si clichés

C’est une première: le tribunal de Brive se fait galerie. En mars, il va mettre en lumière le travail photographique de l’artiste Julie de Waroquier. Intitulée « Clichés de femmes : violences visibles et invisibles », l’exposition d’accès libre se tiendra dans la salle des pas perdus. Avec une conférence en amont sur inscription. Un engagement fort du palais pour lutter contre un fléau social.

Les violences à l’égard des femmes et des filles sont parmi les violations des droits humains les plus répandues, les plus persistantes et les plus dévastatrices. D’où la pertinence de cette exposition qui s’ouvrira en amont de la journée internationale du 8 mars. Une journée “des droits des femmes”, et non une journée de la femme à laquelle on réduit l’événement en offrant des fleurs à son entourage féminin. Car il est bien question de droits. Et l’on ne peut les évoquer sans ouvrir justement le dérangeant dossier des violences à leur encontre.

“Il y a une recrudescence d’affaires liées aux violences conjugales“, pointe la procureur Émilie Abrantes, à l’origine du projet, et qui a été touchée par le travail de Julie de Waroquier. “Ce sont des photographies qui m’ont parlé car elles illustrent toutes les typologies de violences faites aux femmes que nous rencontrons et qui alimentent en grande partie notre juridiction.” Car la parole se libère. “Les femmes parlent davantage, elles sont mieux informées. Les professionnels sont également mieux formés à détecter et accompagner. Tout un réseau s’est ainsi établi et développé localement”, argumente la procureur.

Cette prochaine exposition ouvre ainsi plus largement les portes du palais au public, au même titre que ses participations depuis deux ans à la Nuit du droit. “Cela donne un autre regard sur notre quotidien. Nous voulons nous inscrire dans la cité, dialoguer avec les justiciables à travers différentes approches.”

L’approche s’appuie cette fois sur le travail de Julie de Waroquier, une artiste qui a remporté plusieurs prix nationaux et internationaux et qui expose dans des galeries en France comme à l’étranger. L’exposition s’adosse plus précisément à un ouvrage de cette photographe également professeur de philosophie. Intitulé Clichés de femmes et paru en 2019 aux éditions Atlande (collection Photo-Philo), il associe des images aux citations sexistes ou misogynes écrites par nos plus grands philosophes. Bien loin de juger – O tempora, o mores – les propos de ces hommes révélateurs d’autres époques, il s’agit de s’interroger sur notre présent et la portée des mots comme des actes.

C’est également tout le sens donné à un travail engagé auprès des jeunes par la procureur à travers deux lycées brivistes, Lavoisier et Simone Veil. Déjà l’an dernier, des classes de ces établissements avaient étudié la notion du consentement. Ces mêmes élèves, en formation mécanique d’un côté et aide à domicile de l’autre, portent cette année leur regard sur les photographies de Julie de Waroquier. Un travail entamé depuis la rentrée de septembre et qu’ils auront à restituer début mars en amont de l’exposition et en présence de l’artiste. “L’idée est encore de les amener à s’interroger, à travers leur interprétation des images, sur ce que peut être une violence, physique, sexuelle, psychologique, économique…”

Car il y a ce que l’on voit et ce qui échappe au regard. D’où la précision apportée dans l’intitulé de l’exposition: “violences visibles et invisibles”. Parce que la violence se niche aussi dans le huis clos du couple ou d’un milieu familial où peut régner la terreur, sur les femmes comme sur les enfants témoins et eux aussi victimes, avec les séquelles que cela entraine dans leur construction et leur rapport aux autres.

Ce sont tous ces thèmes qui seront également débattus lors d’une conférence publique et gratuite des plus instructives qui se tiendra mercredi 6 mars à 20h au lycée Simone Veil. Aux côtés de l’artiste, de la procureur et de la juriste doctorante Élisa Just, interviendront deux éminents spécialistes qui éclaireront différents aspects: le professeur Pauline Saint-Martin, chef du service de médecine légale du CHU de Tours, qui œuvre pour une meilleure prise en charge des victimes vivantes et le sociologue Eric Mace, vice-président de l’université de Bordeaux, qui détrônera des clichés sur les auteurs de violences comme sur les victimes. Une conférence à ne certes pas manquer

  • L’exposition du 7 au 29 mars au tribunal de Brive, salle des pas perdus. Entrée libre.
  • La conférence, mercredi 6 mars à 20h au lycée Simone Veil. Gratuit mais sur inscription par mail à jep.tj-brive-la-gaillarde@justice.fr.

 

Marie Christine MALSOUTE

Marie Christine MALSOUTE

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