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Samuel Tomatis, “algo” designer

Comment utiliser des algues polluantes pour créer objets et matériaux ? C’est l’extraordinaire projet Alga de Samuel Tomatis. Le designer briviste de 26 ans expose en ce moment au Centre Pompidou dans “La fabrique du vivant”.

Une chaise en algues… une lampe, des objets, des tissus, des matériaux de construction… Samuel Tomatis veut “transformer le déchet en ressource”. Il invente pour nous un autre monde, appâtant dans son sillage un écosystème de scientifiques, artisans, écologistes jusqu’au vieux métier en berne de goémonier (pécheur spécialisé dans la récolte des algues marines).

Son projet, à la fois écologique, technique, esthétique et éthique, séduit et s’est attiré les honneurs de la presse spécialisée comme une promesse d’avenir. En 2017, le designer a d’ailleurs reçu des mains de la ministre de la Culture la prestigieuse Bourse Agora pour le design, soutenue par l’État et la Fondation d’entreprise Hermès : 15.000 euros lui sont attribués au fur et à mesure de l’avancée de son projet. Il était alors tout jeune diplômé de LISAA (L’Institut supérieur des arts appliqués) et de la non moins réputée ENSI (École nationale supérieure de création industrielle). Avec les félicitations du jury.

Le jeune homme n’est pourtant pas un spécialiste de la mer. “C’est un endroit de contemplation qui m’a toujours inspiré. J’y suis très attaché.” Né à Annecy, Samuel a grandi à Brive. Au collège Rollinat, il rêvait déjà couleurs et volumes. Au lycée d’Arsonval, il a suivi l’option artistique dans la filière littéraire. “Mes cours préférés étaient ceux de Fati et Denis Dufour, mes profs d’arts plastiques.”

Après le bac, il se cherche et s’oriente dans un double cursus en design d’objet et architecture d’intérieure. C’est pour son master qu’il commence à développer son projet de recherche sur la création de nouveaux matériaux en algues. “Mon mémoire traitait déjà de l’éco conception et du bio mimétisme, s’inspirer du vivant comme modèle à la création”, explique-t-il comme une suite logique. “Je me rendais régulièrement en vacances en Bretagne. J’ai vu tout ce problème de prolifération des algues qui à cause de l’eutrophisation des eaux crée une matière organique polluante, des gaz toxiques. Ma démarche première était d’élever ce déchet au rang de production positive et durable.”

Il tâtonne dans les ateliers de l’école. “J’ai travaillé comme un alchimiste, je faisais mes propres recettes, mes propres mixtures, mes moules. Je me suis ensuite rapproché de chimistes, biologistes et ingénieurs pour travailler sur des process semi-industriels en laboratoire. On a commencé à identifier les différentes algues. Elles ont chacune des caractéristiques intrinsèques de souplesse, résistance, opalescence… Ce qui donne des matériaux qui peuvent ressembler à de la céramique, du papier, du marbre… Le but est d’explorer un maximum de potentialités. L’algue est un matériau vivant, on touche à l’éphémère.”

Samuel interroge son métier de désigner et le rôle sociétal qu’il peut jouer, mais aussi nos modes de production et de consommation. Toujours en mouvement, le jeune autoentrepreneur a le vent en poupe : il vient de rentrer en résidence aux Ateliers de Paris incubateurs de talents, a été contacté pour exposer à la Biennale de Venise en avril… “La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme”, écrivait Charles Baudelaire… Homme libre, toujours tu chériras la mer !

À découvrir sur son site samueltomatis.com.

Photo : Matthieu Barani

Marie Christine MALSOUTE

Marie Christine MALSOUTE

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