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Pascale Anglès: “La Foire du livre est un mille-feuille à savourer sans retenue”

Pascale Anglès, professeure documentaliste au lycée Bahuet et créatrice du prix Marguerite-Bahuet, organise aux côtés des poètes du cru Robert Birou, Juvénal Abita et Philippe Bouret la soirée “La poésie fait son théâtre”, autour de Claudine Bohi, prix Mallarmé 2019 pour Naître c’est longtemps (La tête à l’envers), vendredi à 20h30 au Théâtre de la Grange. Une soirée poétique, conviviale et ouverte à tous qui met à l’honneur la poésie à l’occasion de la 38e Foire du livre de Brive, un événement auquel elle va participer en tant qu’auteur mais qu’elle ne manquerait de toute façon sous aucun prétexte. Elle nous explique pourquoi.

Brive Mag’: Qu’est-ce que la Foire du livre représente pour vous ?

Pascale Anglès: La Foire du Livre est un événement littéraire qui illumine le mois de novembre ! Il permet de découvrir de nouveaux  auteurs mais aussi d’aller vers ceux dont on a aimé les livres ! Un événement exceptionnel à ne rater sous aucun prétexte ! C’est une gourmandise, un millefeuille de pages à savourer sans retenue. D’autre part, j’aime beaucoup sa pérennité : la 38e Foire du livre, c’est la preuve que les Brivistes aiment lire et sont avides de découvertes. Et, en tant qu’auteur, j’aime ces rencontres avec les lecteurs qui sont toujours très touchantes. Cette année, je vais avoir la joie de présenter un nouveau roman Chez Rose et Angelina aux éditions Lucien Souny. Lorsque je commence à voir les chapiteaux blancs se dresser sous la halle Georges Brassens, je suis déjà fébrile et je pense avec émotion à toutes ces personnes qui œuvrent dans l’ombre pour maintenir cet événement à ce haut niveau de qualité ! Quand on regarde dans le rétroviseur on voit combien de prestigieux présidents elle a eus, Jean d’Ormesson, Hélène Carrère d’Encausse, Antoine Gallimard, Jean Teulé, Danièle Sallenave, Delphine de Vigan et cette année Eric Fottorino… Chacun d’entre eux a su et saura donner une couleur bien particulière à cet événement qui fait se croiser tant de personnalités différentes ! J’aime également les conférences et les débats ! J’ai un souvenir inoubliable de la conférence du moine bouddhiste le plus médiatisé : Matthieu Ricard l’an dernier, et un souvenir plus ancien : la rencontre entre Jean d’Ormesson et Marcel Conche le philosophe, c’était jubilatoire : deux orfèvres du langage et de l’esprit ! Et en tant que documentaliste, je suis ravie de toutes les propositions qui sont faites cette année encore pour les lycéens et les collégiens : les auteurs en classe, les expositions… ce sont autant d’occasions rêvées pour découvrir la richesse de la littérature jeunesse ! Car c’est important de donner le goût de la lecture mais aussi de faire connaître le métier d’écrivain qui est quand même assez solitaire et véhicule des fantasmes. Les jeunes sont surpris quand on leur explique que tous les auteurs ne vivent pas de leur plume, ou les difficultés à trouver un éditeur. Ils aiment aussi connaître les sources d’inspirations et les petits secrets d’écriture…

Brive Mag’: Quelle rencontre vous a le plus marqué ?

Pascale Anglès: La rencontre avec Delphine de Vigan, spontanée et naturelle. Elle sait prendre du temps avec ses lecteurs. Je lui ai dit que j’avais lu d’une seule traite Rien ne s’oppose à la nuit publié chez Jean-Claude Lattès ! C’est cela un bon roman vous y entrez d’emblée et vous êtes embarquée par la vérité de l’écriture, chaque mot est à sa place. Le titre est une parole d’une chanson de Bashung, il m’a attiré comme un aimant, je sentais que j’allais être en prise avec une part d’ombre de l’auteur, et que quelque chose avait dû se briser très tôt en elle. Sa mère Lucille, bi-polaire et fragile m’a bouleversée, et j’ai pris ce livre comme une déclaration d’amour maternel et surtout une volonté de se libérer du poids des secrets enfouis dans le puits profond de l’enfance et que seule l’écriture pouvait délivrer. Puis, j’ai beaucoup aimé les romans suivants : D’après une histoire Vraie, Les Loyautés, Les Gratitudes, tous publiés chez JC Lattès.

Brive Mag’: Quel auteur invité cette année retient votre attention ?

Pascale Anglès: J’ai hâte de rencontrer Franck Bouysse, j’ai été bouleversée par son dernier roman : Né d’aucune femme aux éditions la Manufacture de livres. C’est une lecture dont on ne ressort pas indemne, et le personnage de Rose m’a poursuivie longtemps après avoir refermé le livre. Cette héroïne est vendue par son père Onésime à un homme qui se révélera être une sorte d’ogre. Elle va subir violences et humiliations dans une nouvelle vie de servitude sous le regard complice d’une vieille femme. La cruauté de certaines scènes est parfois difficile, mais Franck Bouysse distille l’effroi et l’horreur avec un art subtil. Son écriture somptueuse nous ligote carrément à cette histoire dont Rose parvient à sortir debout. Elle se nourrit de mots volés dans les journaux qu’elle lit, elle entre en résistance et ne succombe pas aux agressions répétées de son bourreau. J’ai vraiment de nombreuses questions à poser à l’auteur sur ses sources d’inspiration et sa capacité à prendre de la distance avec la violence des situations qu’il crée. Je voudrais lui dire que le résultat est stupéfiant car il a vraiment écrit un livre qui envoûte, et agit en profondeur sur le lecteur. Rose devient au fil des pages un être de lumière qui déchire les ténèbres de ces huis clos d’une noirceur effrayante. Résiliente et courageuse, elle ne demande qu’à vous raconter son histoire.

Jennifer BRESSAN

Jennifer BRESSAN

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