Tino, un croisé labrador de 10 ans abandonné dans la rue il y a 5 ans, était le plus ancien pensionnaire de la SPA de Brive. Il aura fallu le confinement pour qu’il recouvre sa liberté.
Cinq ans qu’il observait la valse des arrivées et des départs dans les boxes à côté de lui. Cinq ans que les visiteurs passaient sans le voir, sans le vouloir. Tino a passé la moitié de sa vie à la SPA de Brive. Le travail quotidien des employés, au refuge comme sur le site internet et les réseaux sociaux, a enfin porté ses fruits. A 10 ans, c’était inespéré mais Tino a enfin trouvé les maîtres affectueux qu’il méritait.
Sonia et Antoine, dit Tony, habitent la Feuillade à un quart d’heure du refuge mais ce sont par leurs enfants qu’ils ont eu vent de ce pensionnaire pas comme les autres. « Mes fils sont allés faire des stages au refuge, explique Sonia. Tino était déjà là quand le premier y est allé. Il y était toujours quand ce fut au tour du second. Cela faisait quelque temps qu’on voulait adopter un chien, poursuit-elle. On cherchait sans chercher. » Jusqu’à ce que ce labrador se rappelle à leur bon souvenir. « On a appelé le refuge.» A la suite d’échanges par mail puis d’entretiens par téléphone, le couple s’est déplacé. Quinze jours d’essai à la maison ont suivi. « Il n’en a pas fallu autant pour que Tino s’acclimate à sa nouvelle vie. Bien sûr, les premiers jours, il ne s’est pas laissé approcher. On n’efface pas cinq années comme cela. Tout était nouveau pour lui. Mais il ne lui a pas fallu longtemps. » En un jour et demi, c’était plié. Aujourd’hui, Tino ne lâche plus Tony. « C’est le chien qui a adopté mon mari ! » Son âge ne les a pas effrayés. « Tous les chiens, même les plus vieux, surtout eux, ont droit à une nouvelle vie, une plus jolie fin de vie. »
Au refuge, une vingtaine de chiens et autant de chats sont encore là. « La situation n’est pas si mauvaise que cela », souffle Frédéric Gillot, le directeur du refuge de Brive. « Nous avons eu assez peu d’abandons. » Plusieurs raisons à cela. « Comme les gens sont confinés chez eux, peut-être que les animaux se sauvent moins. Peut-être aussi que les animaux errants sont moins repérés comme il y a moins de monde en ville. » Alors il craint un rebond après le déconfinement. « Sans compter qu’on entre dans la mauvaise période. » Les stérilisations des chattes sont encore trop rares. Dès le mois de mai, c’est une vague de chatons qui, retrouvés dans les poubelles et les cartons, déferle sur le refuge.
Côté adoption, avant la dérogation du 16 avril qui a permis aux gens de sortir pour adopter, le directeur amenait lui-même les animaux chez les gens. Situation oblige, la procédure passe aussi par de longs entretiens par mail puis par téléphone pour débusquer « les adoptions de convenance » et éviter les décisions irréfléchies dictées par l’ennui momentané. « Un chien, c’est aussi par ces temps une excuse pour sortir se promener. » Le personnel du refuge a ainsi été encore plus vigilant que d’habitude et quelques adoptions ont pu être menées à leur terme. Moins qu’en temps normal cependant. Alors « pour compenser la perte financière qui nous met en difficultés, une cagnotte en ligne va être lancée par des étudiants en école de commerce », souligne Frédéric Gillot.
En attendant, les six employés du refuge continuent le travail auprès des animaux en respectant les gestes barrière. « Entre nous, on garde nos distances, on a du gel, on met des masques, des gants, on est déjà habitués à respecter des protocoles d’hygiène, surtout lorsque l’on se retrouve avec 130 chats en été », continue le directeur en rappelant l’urgence et l’utilité de la stérilisation des chattes. Et, termine-t-il, « si on veut se séparer de son animal, il faut avoir le courage de l’emmener au refuge plutôt que de l’abandonner dehors. Nous ne jugeons personne et connaître le nom de l’animal, son âge, ses habitudes de vie, son caractère nous aident à le replacer plus vite. » Le moins que le maitre démissionnaire puisse faire.