“Bastion” de joies et non “de larmes”, titre de son dernier roman toujours en course dans les sélections littéraires, pour l’écrivain et cinéaste marocain d’expression française. Le jury du prix de la langue française vient de le couronner lauréat 2024. Son prix lui sera remis pendant la Foire du livre.
En 2010, il avait reçu le prix de Flore pour Le Jour du roi (chez Seuil). Déjà. Chacun de ses nouveaux opus a toujours été salué pour sa dimension autant narrative que sociologique. Le Bastion des larmes (paru en août dernier aux éditions Juillard), son onzième roman, est dans cette veine. Il est d’ailleurs en lice pour le Goncourt, le Médicis et le prix Décembre. Dans ce récit brûlant, Abdellah Taïa revient solder les comptes d’une enfance meurtrie dans le Maroc des années 1980. Le livre, déchirant, raconte la violence d’une société où l’homosexualité demeure pénalement répréhensible. Un éblouissant récit qui interroge aussi les notions de vengeance et de pardon, d’impossible pardon. Mais comment se reconstruire sans? Et que le chemin est difficile pour vivre à sa manière. Figure de proue de la communauté LGBTQ+ marocaine, en 2006, Abdellah Taïa a été le premier écrivain à assumer son homosexualité en une de l’hebdomadaire Tel Quel. Une personnalité engagée.
Il est également l’auteur de L’Armée du salut (2006) qu’il adapté pour le cinéma. Son premier film présenté à la Monstra de Venise. Il signe aussi Une mélancolie arabe (2008), Celui qui est digne d’être aimé (2017), ou encore Vivre à ta lumière (2022). Ses livres sont traduits dans plusieurs langues. Depuis le début du Printemps arabe, il publie également plusieurs tribunes dans des journaux français et marocains.
Nul doute que le lauréat apprécie le bel intitulé de ce prix “de la langue française”, créé par la Ville en 1986. Le Prix, doté de 10.000 euros, distingue une personnalité du monde littéraire, artistique ou scientifique, dont l’œuvre contribue de façon importante à illustrer la qualité et la beauté de la langue française. À son prestigieux palmarès figurent notamment la Prix Nobel de littérature Annie Ernaux, lauréate en 2008, Pierre Assouline, Emmanuel Carrère, Mona Ozouf, Pierre Bergounioux ou Louis-Philippe Dalembert. L’an dernier, il est revenu à Ananda Devi.