Un journaliste peut-il écrire des romans? La question était au centre d’un débat organisé ce matin dans l’espace Alain Gazeau. Il a réuni autour de Franz-Olivier Giesbert des journalistes et écrivains au premier rang desquels Patrick Poivre d’Arvor.
“Pour moi, c’est un vrai faux problème”, a d’emblée tranché Mémona Hintermann, grand reporter à France 3, conseillère pour le CSA depuis janvier 2013 et écrivain. “C’est comme se demander quel est le sexe des anges!”
Reste qu’au début de sa carrière, Patrick Poivre d’Arvor a subi cette question: “J’ai écrit mon premier roman à 17 ans. Ce n’est qu’après que je suis devenu journaliste et que mes livres ont commencé à paraître.” Et il se souvient, qu’à l’époque, les gens se demandaient de quel droit, en quelque sorte, le présentateur du journal de France 2 écrivait des romans, a fortiori peut-être, des histoires d’amour.
A l’unanimité, les invités ont recentré cette question autour du temps opposant la rapidité inhérente au métier de journaliste et le recul nécessaire à la position de l’écrivain: “Le journaliste ne peut pas avoir le problème de la page blanche. On ne pisse pas de la copie comme on pisse des romans”, a lâché Arnaud Viviant, critique littéraire et romancier, approuvé par Patrick Poivre d’Arvor: “Après le JT, j’avais besoin d’un sas de décompression d’au moins trois heures. J’écrivais entre minuit et 4 heures du matin”, une bulle pour lui, un espace où il ne pensait plus au journal de la veille, pas encore à celui du lendemain. “A ce moment-là, lorsque tout le monde dormait, je me sentais le roi du monde.” Il poursuit: “Assez souvent, on subit l’article; le roman, lui, personne ne nous le demande, ne l’attend. Il n’y a pas de manifestations dans les rues pour accélérer sa sortie! Le roman est une force impérieuse mais il ne doit pas être “abîmé par nos tares journalistiques”.
“Marier les deux pratiques me semble justement être un assez bon équilibre”, ajoute Etienne De Montéty, directeur du Figaro littéraire et écrivain. “La littérature est pour moi une forme subjective du journalisme”, définit pour sa part Arnaud Viviant. “Quand j’écris un article”, poursuit-il, “mon but est d’accrocher le lecteur dès la première ligne et faire en sorte qu’il ne me quitte pas. Dans le cas d’un livre, ce n’est pas ma priorité. Je me fous du lecteur!”, provoque-t-il. “J’écris pour épater le grand écrivain lu et admiré.” Et Patrick Poivre d’Arvor de conclure: “Epater aussi le petit garçon qu’on a été.”
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