Le Progrès daté du 15 mai 1845 annonce que le chemin de fer reliant Bordeaux à Périgueux sera continué jusqu’à Brive. C’est chose faite le 17 septembre 1860. Une date à marquer d’une pierre blanche pour la cité gaillarde désormais parée pour amorcer son expansion à un train d’enfer.
Brivemag.fr poursuit sa série d’articles puisés dans l’ouvrage commémorant en 1960 le centenaire de l’inauguration du chemin de fer. Episode 2.
Cette machine de fer fumante, glorieuse révolution, fait sa première apparition à Brive le 17 septembre 1860, en provenance de Périgueux. Le train qui perfore alors la luxuriante végétation de nos contrées encore enclavées, permet à la cité de se faire une place dans le grand sud-ouest. Grâce au raccordement ferré de Brive avec Bordeaux et son port, le développement de la cité gaillarde était en marche et devait dès lors filer bon train.
Ce sont 72 km et 9 stations qui ponctuent alors le trajet entre Périgueux et Brive: Niversac, St-Pierre-de-Chignac, Milhac-d’Auberoche, Thenon, Labachellerie, Condat, Terrasson, la Rivière-de-Mansac et Larche. Un périple qui pouvait durer des heures et des heures lorsque le train faisait arrêt dans toutes ces gares. Néanmoins, en aller direct, ce trajet colossal ne représente plus que deux heures. Ce qui, pour l’époque et compte tenu de la vitesse du train, témoigne du soin avec lequel le tracé du trajet avait été réalisé.
Ce premier voyage a réuni une très grande foule de curieux. Il a été relaté que tous leurs regards, ébahis et incrédules, scrutaient la machine à vapeur, comme pour en extraire son secret. Un secret qui pour certains trouvait nécessairement son explication dans l’âme d’un sorcier, qui ne pouvait qu’être à la manœuvre des wagons. Comment expliquer sans cela le fonctionnement de cette gigantesque machine filant sur les rails à une si vive allure…
C’est sans encombre que ce trajet semble s’être déroulé. Une petite anecdote vaut néanmoins son pesant d’or : “A Larche, une femme qui avait oublié son panier de provisions sur le quai, s’en apercevant après le départ, criait de toutes ses forces à la portière d’arrêter le train ; on eut beaucoup de peine à lui démontrer que c’était impossible”. Ce récit illustre bien la nouveauté d’une technologie qu’il reste encore à apprivoiser.
Une autre petite pépite qu’on laisse à votre appréciation est la durée du trajet pour relier Bordeaux à Brive… On vous le donne en mille : 9 heures. Machine à voyager dans le pays, le train est donc à ce moment-là aussi, une machine à voyager dans le temps ! Ainsi, un départ à 6h le matin vous faisait arriver à 14h56. Côté deniers, trois tarifs existent alors : 22,30 francs en 1ère classe, 16,70 francs en 2nde et 12,25 francs pour la troisième. Places de luxe, coupés-lits et wagons-salons… Il y en a alors pour tous les goûts, toutes les bourses, toutes les envies. Et question envie, beaucoup furent ceux qui n’en manquaient pas. On dit que la recette du premier jour à Brive aurait dépassé le chiffre, énorme pour l’époque, de 1.100 francs. Est-ce à dire que le sifflement du train prenait alors des airs de chant des sirènes? En tout cas, tel Ulysse, nombreux furent ceux qui ne purent résister à cet appel.
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