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Des crêpes et du cran

Isabelle Chipeau vient de créer sa micro entreprise et de se lancer à bord de son food truck dédié aux crêpes. Sous le moelleux de la pâte et la joliesse du projet, elle raconte son parcours du combattant, son burn out et le refus de la misère, elle qui il y a moins d’un an frappait à la porte du Secours populaire.

Vous avez peut-être déjà croisé sa jolie petite camionnette aux formes arrondies et vert pastel. A son bord, dans la cuisine aménagée, Isabelle Chipeau fait des crêpes qu’elle sert aux quatre coins de la ville. Singulière, cette femme haute en couleurs en a fait des détours, suivant les chemins de traverse, ouvrant portes et brèches. Elle est née loin de la Corrèze, à Paimbœuf, en bordure de mer, à une heure de Nantes. Elle a travaillé dans les bureaux des Galettes Saint-Michel, dans un bar à thèmes au Mans; puis de la Vendée, elle s’est envolée en Afrique pour faire de l’humanitaire. Déjà maman d’un petit garçon, elle est rentrée en France enceinte de ses jumelles.

Et c’est au début des années 2000 qu’elle pose avec son ex mari un pied à Objat, puis ses valises. « J’ai eu le coup de foudre pour ces petits villages corréziens », explique-elle. Ici, elle exerce comme auxiliaire de vie pour les personnes âgées dix ans durant. « Puis j’ai divorcé et c’est là que ça a commencé à être terriblement dur. » Fini le mi-temps, elle doit augmenter son salaire pour subvenir aux besoins de ses trois enfants. «J’ai eu la tête dans le guidon pendant trois ou quatre ans, jusqu’au burn out », et son licenciement.

A 50 ans passés, elle a bien dû se relever, sortir de la précarité. Elle vend alors bijoux et télévision pour remplir le réfrigérateur et frappe à la porte du Secours populaire et des Restos du cœur en septembre 2019. « Isabelle est quelqu’un qui communique facilement. Il est aisé de créer un lien avec elle », confie Christine Carlier du Secours populaire. « Elle avait un projet, on ne l’a plus lâchée. Son parcours est exceptionnel. »

Tenace, “têtue” même de son propre aveu, Isabelle Chipeau s’est accrochée et a porté son projet jusqu’au bout avec le soutien de l’association Airelle Corrèze. « Créer son entreprise quand on a de la trésorerie c’est déjà compliqué, mais quand on est dans le rouge, il faut se battre, pousser les portes, arracher les bonnes clés. » Elle poursuit: « Je n’ai jamais connu la misère et je l’ai toujours refusée. J’ai travaillé dur, seule, jour et nuit et pleuré devant des interrogations techniques et mécaniques. Mais j’ai aussi adoré me plonger dans le prévisionnel et dans les chiffres.»
Et, avec sa cagnotte lancée sur Twitter, elle tente le tout pour le tout. Banco ! L’objectif est atteint. Elle tient son apport personnel et part, son dossier de vingt-deux pages sous le bras et son sourire sur le visage, frapper à la porte de cinq banques. « J’ai eu beaucoup de plaisir à leur présenter. Tous m’ont dit que j’avais fait du beau boulot, que c’était propre et cohérent. »

Une chose les a étonnés : son choix d’un food truck sans permis. « Comme les camions classiques sont plus longs, il est plus difficile d’obtenir des accords pour les emplacements. Ils sont plus chers aussi. Mon budget m’aurait imposé d’en prendre un d’au moins vingt ans mais il y aurait eu les frais d’entretien. Et puis, celui-là je l’ai tout de suite trouvé beau ! Le look est important. Il attire les clients au loin et moi je fais le reste ! »

Des crêpes, en l’occurrence! Confiture, chocolat et les beurre sucre à 1 euro “pour que même les gens comme je l’étais avant puissent acheter un produit bon et sain”. Puis il y a les crêpes gourmandines. Dans le cône, fruits frais, coulis, sauce chocolat, glace, chantilly… et les galettes salées au sarrasin, le tout travaillé avec des produits locaux le plus possible. Les crêpes, pour beaucoup synonymes de retour en enfance, lui offrent à elle le moyen d’une vraie renaissance. « Et si, à travers mon histoire, cela peut donner envie à certains de reprendre leur vie en mains, alors ce sera ma deuxième victoire ! »

Où trouver le food truck d’Isabelle Chipeau ? En juin sur le parking de Leroy Merlin les mercredis (12h-14h) et samedis (12h-17h); 44 avenue Pierre Sémard, près de Cabanis les midis de semaine et devant le groupe scolaire Puymaret à la sortie des classes. Les midis de juillet à Malemort à côté de la concession Renault. Également toutes les fins d’après-midis de l’été, sur l’avenue Pompidou près de la Ressourcerie ou encore les jours de match devant le stade dès que la saison de rugby reprendra. Infos : 06.13.20.77.48

 

 

 

 

Jennifer BRESSAN, Photos : Diarmid COURREGES

Jennifer BRESSAN, Photos : Diarmid COURREGES

2 commentaires

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    Bravo Isabelle pour votre courage et votre persévérance. A bientôt pour goûter vos crêpes.

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    Merci beaucoup ?.
    Ça été une sacrée aventure et une aventure humaine. J’ai fait des belles rencontres tant professionnelles qu’associatives.
    Suite à ma cagnotte sur tweeter, j’ai été beaucoup soutenue, tous ces gens m’ont tirée vers le haut.
    C’est une vraie saga cette cagnotte sur tweeter car j’ai rencontré des hauts et des bas… le stresse de ces commissions avec jury à passer…mais quelle satisfaction a l’arrivée. C’est géant ?

    Je ne me rendais pas bien compte du travail que j’avais fait, j’avais la tête dedans, j’étais dans ma bulle…je savais que je devais faire vite et ne rien louper car le temps jouait contre moi. Le temps c’était la misère, je savais qu’elle allait encore évoluer. Elle me faisait peur … pas le choix je me suis plongée dans mon projet et voilà ? maintenant je passe de la théorie à la pratique. On va dire que je suis dans une autre bulle ??
    Je continue d’apprendre, j’écoute et je m’adapte.
    Il me faudrait …il nous faudrait quelques rayons de soleil. ☀️
    Merci pour vos remerciements ?? ??

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